Sophie
DESMARETS
Naturellement
irrésistible
Vrai nom : Jacqueline Yvonne Eva Desmarets.
Née à Paris (16ème) le 7 avril 1922.
Décédée à Paris le 13 février 2012.
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Elle est née Jacqueline Desmarets le vendredi 7 avril 1922 à 11 heures au 56
boulevard Exelmans à Auteuil.
Son père, Robert, doit à son mentor Henri Desgrange, fondateur
du Tour de France, la direction du Vel d'Hiv où il créera les célèbres courses
des six jours. C'est d'ailleurs par haut
parleur qu'il apprend en même temps que le public la naissance de sa fille.
A neuf ans, ses parents quittent Auteuil pour Suresnes. Jacqueline fréquente le lycée de Saint-Cloud,
puis passe un an comme pensionnaire à l'Institut Montesano de Gstaad, en
Suisse, où les études sont réputées sérieuses et l'air divinement sain, ce qui
est le but recherché pour apaiser une mauvaise toux persistante contractée en
Ile-de-France.
Au retour, elle se retrouve au collège de
Neauphle-le-Château ou lors d'une fête elle connaît son premier contact avec
les planches dans un répertoire aussi éclectique que celui des vaudevilles de
Labiche et d' Iphigénie de Racine.
Sa mère, Yvonne Latreille, adore le théâtre et ne se
prive pas de le lui faire découvrir.
En 1935, Henry Bernstein aux commandes du Théâtre du
Gymnase présente sa dernière pièce, Le cœur.
Sophie assiste, subjuguée, à la représentation. Elle a 23 ans. Blanche Montel en est la vedette avec Claude
Dauphin et Jean-Pierre Aumont et elle est évidemment à mille lieues de penser
qu'elle les retrouvera professionnellement par la suite.
C'est lors d'une rencontre fortuite avec Louis Jouvet que
son destin de comédienne va se décider.
Le Maître, capté par son ingénuité, lui avoue : "Vous avez
vraiment un physique de théâtre, si un jour vous voulez jouer, venez me
voir".
Une appréciation qui ne tombe pas dans l'oreille d'une
sourde. Elle ne se fait pas prier et
entre directement comme auditrice libre dans sa classe du Conservatoire, puis
au Théâtre de l'Athénée. Mais c'est la
guerre, et Jouvet qui ne veut pas jouer pour l'occupant, quitte la France pour une
tournée en Amérique du sud.
Jacqueline suit alors, en parallèle, les cours dispensés
par Beatrix Dussane au Conservatoire et ceux de René Simon. Elle fréquente Jacques Charon, Daniel Gélin,
Françoise Christophe, Gérard Philipe, Jean-Pierre Grandval (le fils de
Madeleine Renaud), qui restera longtemps son amoureux transi et platonique.
Rassurons-nous, il finira par se marier avec une non comédienne… et par
divorcer.
En mars 1941, Sophie, toujours Jacqueline, effectue ses
premiers pas sur scène avec ses camarades du cours Simon au Théâtre Montansier
de Versailles où lui échoit un rôle de religieuse dans Le chant du berceau.
En 1942, elle se produit au Théâtre de l'Avenue dans Léonor
de Silva d'après Calderón, la pièce tient un mois. La suivante, par contre, Monsieur de
Falindor, rencontre un vif succès.
Suit en 1943, Les incompris une pièce en un acte
de Henry de Montherlant… qui ne sera jouée qu'un seul soir !
En 1944, elle sort du Conservatoire avec un premier prix
de comédie moderne grâce à Feydeau et à Mais n'te promène donc pas toute
nue… tout un programme, d'autant plus qu'elle passe sa scène en chemise de
nuit ! Les jurés s'emportent, tandis que Jacqueline reste sereine et sans que
la chemise de nuit en soit la cause, décide d'opter pour un changement de
prénom : Jacqueline devient désormais Sophie.
Les restrictions liées aux circonstances de l'époque font
qu'elle ne peut être engagée à la Comédie Française comme le veut la tradition
et en 1950 lorsque Piere-Aimé Touchard, le nouvel administrateur, lui propose
d'y entrer, prise par le boulevard et ses engagements cinématographiques, elle
est contrainte de décliner l'offre.
Sophie mène de front une carrière théâtrale, son terrain
de prédilection, avec des comédies spirituelles dont la plupart sont
irrémédiablement vouées au succès. Dans
sa théâtrographie, relevons son premier rôle après la Libération, en 1945,
celui d'une jeune aubergiste riche dans Au petit bonheur, de
Marc-Gilbert Sauvajon, aux côtés de Gérard Philipe et d'Odette Joyeux. Elle enchaîne avec Le soldat et la
sorcière d'Armand Salacrou avec Pierre Renoir et dans un rôle de figurant,
un jeune homme maigre et fiévreux, répondant au nom de Roger Plemiannikov, qui
se fera connaître plus tard au cinéma sous le nom de Roger Vadim.
1950 marque la première rencontre avec Barillet et Grédy
qui lui proposent Ami-Ami au Théâtre Daunou. Et puis s'enchaînent : Le sabre de mon
père, de Roger Vitrac (Théâtre de Paris); Hélène ou la joie de vivre,
d'André Roussin (Théâtre de la Madeleine); Une femme trop honnête,
d'Armand Salacrou (Théâtre Edouard VII); La jument du roi, de Jean
Canolle (Théâtre de Paris); Adieu Prudence, de Barillet et Grédy
(Théâtre du Gymnase); Fleur de cactus, des mêmes (Théâtre des
Bouffes-Parisiens); Quatre pièces sur jardin, toujours des mêmes
(Théâtre des Bouffes-Parisiens); L'arc de triomphe, de Marcel Mithois
(Théâtre Saint-Georges); Peau de vache, ou Barillet et Grédy lui
confectionnent sur mesure (paraît-il ?) le rôle de la mégère inapprivoisée
tyrannisant non seulement son mari, Daniel Ceccaldi, mais également tout son
entourage. (Théâtre de la Madeleine).
Avec ses fossettes rieuses, ses réparties et son humour
perpétuellement empreint d'optimisme, comment peut-elle nous faire croire
qu'elle ait le mauvais caractère qu'elle s'attribue dans son livre de souvenirs
("Les mémoires de Sophie" – éditions de Fallois 2002) ?
Parallèlement au théâtre, elle se produit à la radio
(entre autres, "Les grosses têtes" de Philippe Bouvard) ainsi qu'au
cinéma.
Pour ce dernier, il s'agit le plus souvent d'oeuvrettes charmantes,
sans prétention, destinées avant tout à divertir.
Après une figuration que lui confie Henri Decoin dans Battement
de cœur, elle commence réellement sa carrière en 1941 avec Premier
rendez-vous du même Decoin et avec la même vedette féminine, Danielle
Darrieux, en l'occurrence fraîchement divorcée du réalisateur.
Suivent, sans pouvoir les citer tous, Seul dans la
nuit, une comédie policière de Christian Stengel; Mon ami Sainfoin, un
curieux voyage de noces tourné près de Positano en Italie avec Alfred Adam,
l'un de ses partenaires préférés, et Pierre Blanchar en tête d'affiche.
Ma pomme, l'histoire d'un clochard philosophe interprété par
Maurice Chevalier qu'elle retrouve après avoir tourné l'année précédente Le
roi de Marc-Gilbert Sauvajon; Le secret de sœur Angèle, dans un
registre plus grave puisqu'elle endosse les habits d'une religieuse; ce qui
n'empêche pas un changement radical avec Les trois font la paire où
Guitry, dont c'est le dernier film, lui confie le rôle de Titine, une
prostituée; Ces sacrées vacances de Robert Vernay, un film bon enfant
qu'elle apprécie à titre personnel et qui conte les mésaventures d'un couple de
Français moyens en vacances sur la Côte d'Azur; Ma femme est formidable
suivi de Mon mari est merveilleux, comédies de même facture signées
André Hunebelle, la première ayant été récompensée au Festival de Vichy; Le
mur de l'Atlantique qui lui permet d'incarner la sœur protectrice de
Bourvil en restaurateur normand; et enfin son dernier film qu'elle doit à
Gérard Jugnot Fallait pas !...
dans lequel elle interprète la mère de Michèle Laroque.
En 1962, elle est membre du jury au Festival de Cannes
avec Romain Gary, Mel Ferrer et Francis Truffaut vis-à-vis duquel elle avoue
une absence totale d'atomes crochus…
Elle fait aussi de la télévision, notamment, les pièces Madame
Sans-Gêne de Claude Barma et Le préféré des incontournables Barillet
et Grédy, où elle reprend la rôle créé par Judith Magre au Théâtre de la
Madeleine. Quelques téléfilms également
: Les chiens ne font pas les chats avec Natacha Amal; Toutes griffes
dehors avec Jacques François; Paris-Vichy avec Jean-Pierre Aumont, etc.
Avec son amie Andrée Debar, elle se lance dans les
antiquités et ouvre à l'enseigne de "Cactus Bazar", dans le 2ème
arrondissement, un magasin de brocante qui s'avère rapidement un désastre
financier. Sophie reconnaissant
volontiers un sens des affaires vraiment peu affiné… "acheter trop cher
pour vendre trop bon marché" n'étant pas la meilleure formule de
gestion.
Elle fut mariée à René Froissant, de qui elle eut
Catherine, et au marquis Jean de Baroncelli-Javon, romancier et critique de
cinéma au "Monde", de qui elle eut Caroline.
En 1981, elle connaît ses premiers ennuis de santé dont
une surdité qui, malgré des soins par mésothérapie, ne font que s'aggraver et
qui constitueront finalement l'arrêt de sa carrière.
Néanmoins, elle a conscience d'avoir eut une vie
privilégiée. Familialement et professionnellement. Aujourd'hui encore, elle est toujours étonnée
par les gens qui la reconnaissent, l'abordent et la remercient de les avoir
fait rire, de les avoir fait oublier leurs peines ou leurs soucis le temps d'un
spectacle.
Et comme elle conclut elle-même : "Après tout, ce
n'était peut-être pas aussi idiot que ça, de choisir pour métier de faire l'andouille ! "
Et à toi, chère Sophie, merci de nous avoir offert ton
talent, ta chaleur et ton incurable optimisme.
Et un merci tout particulier à ces deux teignes,
Mademoiselle Vignault (de Fleur de cactus), et l'atrabilaire Marion (de Peau de vache) !
FILMOGRAPHIE.
1939
Battement de cœur, de Henri Decoin, figuration.
1941
Premier rendez-vous, de Henri Decoin, avec Danielle Darrieux.
1942
L'homme qui joue avec le feu, de Jean de Limur, avec Georges Marchal.
Des jeunes filles dans la nuit, de
René Le Hénaff, avec Gaby Morlay.
Etoiles de demain, court métrage de
René Guy-Grand.
1943
Premier prix de conservatoire, court métrage de René Guy-Grand.
1945
Le capitan, de Robert Vernay, avec Pierre Renoir.
120, rue de la gare, de Jacques
Daniel-Norman, avec René Dary.
Seul dans la nuit, de Christian
Stengel, avec Bernard Blier.
1946
Rocambole, de Jacques de Baroncelli, avec Pierre Brasseur.
1947
Tierce à cœur, de Jacques de Casembroot, avec Henri Guisol.
Croisière pour l'inconnu, de Pierre
Montazel, avec Claude Dauphin.
1948
Les souvenirs ne sont pas à vendre, de Robert Hennion, avec Blanchette
Brunoy.
Femme sans passé, de Gilles Grangier,
avec François Périer.
Rapide de nuit, de Marcel
Blistène, avec Roger Pigaut.
Vire-vent, de Jean Faurez, avec Roger
Pigaut.
La veuve et l'innocent, d'André Cerf,
avec Jean Tissier.
1949
Le roi, de Marc-Gilbert Sauvajon, avec Maurice Chevalier.
Mon ami Sainfoin, de
Marc-Gilbert Sauvajon, avec Pierre Blanchar.
1950
Ma pomme, de Marc-Gilbert Sauvajon, avec Maurice Chevalier.
Demain, nous divorçons, de Louis
Cuny, avec Jean Desailly.
Désordre : vision de
Saint-Germain-des-Prés, documentaire de Jacques Baratier.
1951
Signori, in carrozza / Rome-Paris-Rome, de Luigi Zampa, avec Aldo
Fabrizi.
Ma femme est formidable, d'André
Hunebelle, avec Fernand Gravey.
1952
Mon mari est merveilleux, d'André Hunebelle, avec Fernand Gravey.
1953
Femmes de Paris, de Jean Boyer, avec Brigitte Auber.
1954
Scènes de ménage, d'André Berthomieu, avec Marthe Mercadier.
Escalier de service, sketch "Les
Dumeny", de Carlo Rim, avec Danielle Darrieux.
Le fils de Caroline chérie, de Jean
Devaivre, avec Jean-Claude Pascal.
1955
Gli ultimi cinque minuti / Les cinq dernières minutes, de Giuseppe
Amato, avec Rossano
Brazzi.
Le secret de sœur Angèle, de Léo
Joannon, avec Raf Vallone.
Ces sacrées vacances, de Robert
Vernay, avec Pierre Destailles.
Une fille épatante, de Raoul André,
avec Raymond Rouleau.
Si Paris nous était conté, de et avec
Sacha Guitry.
1956
Miss Catastrophe, de Dimitri Kirsanoff, avec Philippe Nicaud.
Ce soir les jupons volent /
Princesses de Paris, de Dimitri Kirsanoff, avec Brigitte Auber.
1957
Fumée blonde, de Robert Vernay, avec Darry Cowl.
Les trois font la paire, de Sacha
Guitry et Clément Duhour, avec Michel Simon.
Filous et compagnie / Les
filous, de Tony Saytor, avec Pierre Destailles.
1958
Drôles de phénomènes, de Robert Vernay, avec Philippe Clay.
La vie à deux, de Clément Duhour,
avec Fernandel.
Madame et son auto, de Robert Vernay,
avec Jacques Morel.
Nina, de Jean Boyer, avec Jean
Poiret.
1960
La Française et l'amour, sketch "L'adolescence", de Jean
Delannoy, avec Roger Pierre.
La famille Fenouillard, d'Yves
Robert, avec Jean Richard.
Anonima cocottes / Petites femmes et
haute finance, de Camillo Mastrocinque, avec Francis
Blanche.
1961
La ragazza di mille mesi / Défense d'y toucher, de Steno, avec Ugo
Tognazzi.
1963
Dragées au poivre, de Jacques Baratier, avec Sophie Daumier.
Le motorizzate / Les motorisées,
sketch "La femme à la Jaguar", de Marino Girolami, avec
France Anglade.
La foire aux cancres, de Louis
Daquin, avec Dominique Paturel.
1964
La chance et l'amour, sketch "Lucky la Chance", de Charles
Bitsch, avec Michel Piccoli.
1965
La tête du client, de Jacques Poitrenaud, avec Jean Poiret.
1966
Toutes folles de lui, de Norbert Carbonnaux, avec Robert Hirsch.
Le désordre à vingt ans, documentaire
de Jacques Baratier.
1970
Le mur de l'Atlantique, de Marcel Camus, avec Bourvil.
1973
La raison du plus fou, de François Reichenbach, avec Raymond Devos.
1977
Le maestro, de Claude Vital, avec Daniel Ceccaldi.
Un second souffle / Check-up, de
Gérard Blain, avec Robert Stack.
1992
Les mamies, d'Annick Lanoë, avec Danielle Darrieux.
1993
Pourquoi maman est dans mon lit ?, de Patrick Malakian, avec
Marie-France Pisier.
1995
Fantôme avec chauffeur, de Gérard Oury, avec Gérard Jugnot.
1996
Fallait pas !..., de et avec Gérard Jugnot.
© Yvan Foucart pour
Les gens du cinéma